Le contrat de bail commercial
Vous avez enfin trouvé le local dont vous rêviez pour exercer votre activité professionnelle ? Si vous envisagez d’y exploiter un fonds commercial, artisanal ou industriel, vous allez probablement devoir signer un contrat de bail commercial. Également appelé « bail 3-6-9 », ce document encadre les relations entre le bailleur et vous, le preneur. Que faut-il savoir avant de le signer ? Quels sont vos obligations, vos droits et la procédure à respecter ? Nos experts vous guident !
Contrat de bail commercial : qu’est-ce que c’est ?
Définition et principales caractéristiques
Le bail commercial est un contrat de location conclu pour un local servant à l’exploitation d’un fonds de commerce, qu’il soit de nature commerciale, artisanale ou industrielle. Comme dans le cadre d’un bail d’habitation, le locataire (également appelé preneur) peut jouir des lieux en contrepartie d’un loyer qu’il versera au propriétaire (ou bailleur). La durée de ce bail est de 9 ans minimum.
Le régime des baux commerciaux est encadré par la loi et notamment par l’article L145-1 du Code de Commerce.
Ce type de contrat offre une protection particulièrement intéressante pour le locataire puisqu’il bénéficie d’un droit au renouvellement de bail. De plus, si le montant du loyer initial est libre, sa révision, elle, est strictement encadrée.
L’objectif ? Sécuriser le locataire et lui permettre de développer sereinement sa clientèle et son activité.
Les conditions de validité du bail commercial
Pour bénéficier des avantages de ce type de contrat, plusieurs conditions devront être réunies :
1 – L’objet du bail : le contrat devra obligatoirement porter sur une construction immobilière, c’est-à-dire un immeuble ou un local. La location d’un terrain ne peut pas faire l’objet d’un bail commercial.
2- L'affectation locale : le local doit être affecté à l'exercice d'une activité commerciale, industrielle ou artisanale. Impossible donc de signer un bail commercial si vous installez votre activité dans un local d’habitation (à moins de demander un changement d’affectation au bureau du cadastre dont dépendent les locaux).
3 – L'exploitation d’un fonds : le locataire devra utiliser ce local pour exploiter un fonds de commerce ou un fonds industriel ou artisanal. Il devra par exemple posséder du matériel, de l’outillage, des marchandises (ce qu’on appelle les éléments corporels) et une clientèle, un nom commercial, etc. (également appelés les éléments incorporels). Les associations ou les professions libérales ne peuvent donc pas signer un bail commercial.
4 – L’immatriculation du propriétaire du fonds : l’activité du preneur devra être enregistrée au répertoire des métiers ou au registre du commerce et des sociétés.
Bail commercial, professionnel, mixte : quelles différences ?
Ce sont tous les 3 des baux à usage professionnel et pourtant, il ne faut pas les confondre !
Le bail professionnel concerne les professions dont les revenus sont imposés dans la catégorie des bénéfices non commerciaux (BNC). Le preneur ne peut pas y exercer une activité commerciale, artisanale ou industrielle. Ce type de contrat, d’une durée de 6 ans minimum, s’adresse donc principalement aux professionnels libéraux (activité juridique, médicale, paramédicale, comptable, etc.) qu’ils aient une entreprise ou une société.
Le bail mixte, lui, est un contrat de location où le preneur utilise une partie du local pour son activité professionnelle et une autre pour son habitation. Ce type de bail s’adresse uniquement aux activités non commerciales (professions libérales et assimilées) et aux artisans s’ils ne possèdent pas de fonds. Sa durée minimale est 3 ans lorsque le propriétaire est une personne physique et de 6 ans s'il est une personne morale.
Bail commercial : durée légale, renouvellement et résiliation
On vous le disait, la durée minimale d’un bail commercial est de 9 ans, sauf s'il s'agit d'une location saisonnière ou d'un bail précaire (également appelé bail dérogatoire). Sa durée peut être plus longue, mais ne pourra pas être indéterminée.
On a coutume d’appeler le bail commercial un « bail 3-6-9 » car il a un fonctionnement triennal. On vous explique ici ce que cela signifie.
Le principe : le droit au renouvellement du bail
Au bout de 9 ans, le locataire bénéficie du renouvellement du bail commercial et peut donc, en principe, exercer ses droits pour rester dans le local. Aucune clause du contrat ne peut prévoir le contraire.
En outre, si le bailleur décide de ne pas renouveler le contrat, il devra obligatoirement le justifier. Si les motifs avancés ne sont pas jugés légitimes, il devra alors payer au locataire une indemnité d'éviction. Le versement de cette somme, au montant relativement élevé, peut dissuader le bailleur de s’opposer au renouvellement du bail.
Cette protection spéciale est appelée la « propriété commerciale »
Le régime des baux commerciaux est donc particulièrement protecteur et avantageux pour le preneur.
Le versement d’une indemnité d’éviction vise à compenser la perte financière que la fin de bail engendre pour le locataire. Son montant peut être fixé à l’amiable entre les 2 parties. Si cela est impossible, il sera déterminé par le tribunal qui se basera sur l’évaluation d’un expert judiciaire.
Cas n° 1 : le bailleur souhaite renouveler le bail
Vous l’avez compris, une fois les 9 années passées, le propriétaire devra se décider. Il peut bien évidemment vous proposer de reconduire le contrat de location.
Il aura alors le droit de réviser le montant du loyer que vous lui versez.
Dans ce cas, il devra vous transmettre son offre de renouvellement 6 mois avant la fin du bail et vous préciser le montant du loyer révisé.
Vous, locataire, pourrez alors :
Accepter le renouvellement et le nouveau loyer, de manière tacite ou plus formelle en donnant votre accord par acte d’huissier ou par lettre recommandée avec accusé de réception.
Accepter le renouvellement, mais refuser le nouveau loyer : vous pourrez alors négocier ce prix à l’amiable. Si aucun accord n’est trouvé, vous ou le bailleur pourrez saisir la commission départementale de conciliation (ou le tribunal judiciaire si aucune conciliation n'est possible).
Refuser l'offre de renouvellement : votre bail prendra fin et vous devrez quitter les locaux sans bénéficier de l’indemnité d’éviction.
Le bailleur a le droit de réviser le loyer à la fin de chaque période triennale (3, 6 ou 9 ans) ou lors du renouvellement du bail. Cette possibilité est toutefois strictement encadrée comme on vous l’explique dans la suite de cet article.
Cas n° 2 : le bailleur souhaite résilier le bail commercial
On vous le disait, si le bailleur souhaite donner congé au locataire sans faire d’offre de renouvellement, il devra vous verser une indemnité d’éviction.
Toutefois, il peut en être dispensé si les raisons qu'il avance sont jugées légitimes :
Le local a été déclaré insalubre et / ou doit être démoli
Le locataire a commis une faute : non-paiement du loyer, l’activité exercée n’est pas celle prévue dans le contrat, troubles du voisinage, sous-location non autorisée, etc.
Le bailleur devra informer le locataire de sa décision par acte d’huissier au moins 6 mois avant la fin du bail commercial.
Si le bailleur a signé un bail notarié, il pourra se voir restituer rapidement son local en cas d’impayés. En effet, la force exécutoire du bail notarié ne nécessite pas d’obtenir un jugement pour faire valoir ses droits de propriétaire.
Cas n° 3 : le locataire souhaite résilier son bail
Le locataire a le droit de résilier son contrat de location à la fin de chaque période de 3 ans, sans motif particulier. Ce type de résiliation sera donc possible au bout de 3, 6 ou 9 ans. C’est ce qu’on appelle le congé triennal.
Il devra alors en informer le bailleur soit par acte d’huissier, soit par lettre recommandée avec accusé de réception 6 mois avant la fin de la période triennale.
Toutefois, il existe des situations où le locataire peut mettre fin au bail de manière anticipée, c’est-à-dire avant la fin d’une période de 3 ans :
Le locataire part à la retraite ou bénéficie d'une pension d'invalidité : il peut donner congé à tout moment mais devra respecter un préavis de 6 mois.
En cas de décès du locataire, les héritiers pourront résilier le bail n'importe quand, avec là aussi un préavis de 6 mois.
Le propriétaire ne respecte pas ses obligations.
Le locataire et le bailleur conviennent d’un accord à l’amiable.
Sans démarches particulières du bailleur ou du locataire, le bail commercial est tacitement reconduit. Le contrat est alors prolongé et vous pourrez rester dans les locaux pour une durée indéterminée.
Cas particulier : la cession de bail commercial
Le locataire peut céder son bail commercial avant l’échéance triennale. Cela signifie qu’il peut le vendre à un autre exploitant qui pourra alors prendre sa place dans le local. Ceci est un droit et rien dans le contrat ne peut l’interdire.
Pour se protéger, le bailleur peut toutefois ajouter une clause au contrat afin de préciser les modalités et les conditions de cette cession.
Le locataire a ainsi le droit de céder :
son fonds de commerce : il vend alors la totalité de son activité commerciale (matériel, marchandises, bail, clientèle, etc.) à l’acheteur (également appelé cessionnaire)
son droit au bail seul : il reste ici propriétaire de son fonds de commerce
Si la cession a bien lieu, le repreneur n’aura pas à signer un nouveau bail et reprendra donc le bail de l’ancien locataire pour la durée restant à courir. Il bénéficiera également du droit au renouvellement.
La sous-location d’un bail commercial n’est autorisée qu’avec l’accord du propriétaire.
Bail commercial : loyer et entrée dans les lieux
Montant du loyer et révision
Le bailleur est libre de définir le montant initial du loyer. En revanche, sa révision est strictement encadrée. Il devra en effet fixer un loyer conforme au prix du marché et donc à la valeur locative du bien.
De plus, l’augmentation de loyer ne peut excéder un certain plafond : elle ne peut pas être supérieure à la variation de l’indice trimestriel du coût de la construction ou des loyers commerciaux.
Le nouveau montant du loyer pourra être fixé soit à l'amiable par le propriétaire et preneur, soit par un tiers désigné par l’un et l’autre, soit par un juge.
Le pas-de-porte
Lors de votre arrivée dans les lieux, le bailleur peut vous demander de lui verser des droits d’entrée, en plus du loyer. C’est ce qu’on appelle le « pas-de-porte ». C’est le bailleur qui en fixe le montant en fonction de l’attractivité commerciale et de l’emplacement du local.
Attention, pour être légal, ce droit d’entrée doit faire l’objet d’une clause inscrite dans le contrat de bail.
Dépôt de garantie
Il est probable que le bailleur vous demande un dépôt de garantie. Son montant correspondra généralement à 1 ou 2 trimestres de loyer. L’objectif est le même que dans le cadre d’un bail d’habitation : le propriétaire se constitue ainsi une réserve financière en cas de manquements de votre part (impayés ou dégradation du local par exemple).
Pour aller plus loin : Tout savoir sur le dépôt de garantie dans un bail commercial
Comment rédiger un contrat de bail commercial ?
La rédaction du contrat de bail commercial n’est pas obligatoire et un simple accord oral est possible. Toutefois, pour protéger le bailleur comme le locataire, il est recommandé de respecter un certain formalisme et de se faire aider par des experts du droit.
Vous êtes relativement libre d’inscrire ce que vous souhaitez dans ce contrat. Néanmoins, certaines mentions restent obligatoires :
Le nom, le prénom et l’adresse du bailleur et du locataire
Le type de commerce ou d'activités exercé dans le local
Le montant du loyer
Le montant et répartition des charges, impôts, taxes et redevances entre le locataire et le bailleur
La répartition des travaux entre les 2 parties (entretien, réparations courantes ou grosses réparations)
Les modalités de règlement du loyer
La durée du bail
Ses modalités de renouvellement et de résiliation
Le montant du dépôt de garantie
La loi ne les impose pas mais le contrat pourra aussi prévoir le montant de l’indemnité d’éviction, les conditions de la mise en sous-location ou de la cession du bail.
Ce contrat pourra également contenir :
Une clause de destination afin de préciser l’activité qu’exercera le preneur ou celles qui seront interdites
Ou une clause de déspécialisation : le locataire sera libre d’exercer l’activité commerciale qu’il souhaite. On parlera alors de « bail tous commerces ».
Le bailleur devra joindre à ce contrat :
Un état des risques naturels et technologiques
Un diagnostic de performance énergétique (DPE)
Un diagnostic amiante
Un diagnostic état des risques naturels, miniers et technologiques (ERNMT)
Depuis la loi Grenelle 2 du 12 juillet 2010, le bailleur doit également fournir au locataire une annexe environnementale (aussi appelée « annexe verte ») si la surface du local est supérieure à 2 000 m². Ce document informe le preneur des consommations d’énergie (traitement des déchets, chauffage, refroidissement, ventilation, éclairage, eau...) et prévoit éventuellement des obligations pour limiter la consommation d’énergie.
Notez enfin qu’il est obligatoire d’établir un état des lieux lors de la conclusion du bail, de sa fin mais aussi de son éventuelle cession.
Vous pouvez faire enregistrer votre contrat de bail soit auprès d’un notaire, soit auprès du service des impôts. Cette démarche n’est pas obligatoire mais atteste de la conformité du contrat au moment de son enregistrement. Cela permettra notamment au locataire de faire valoir ses droits si jamais le propriétaire vendait le local.
Voilà, vous connaissez désormais l’essentiel sur le bail commercial et avez tous les éléments pour décrypter votre futur contrat. Soyez vigilant et surtout, n’hésitez pas à vous faire conseiller pour mener à bien votre futur projet. Nos experts peuvent vous soutenir dans la création de votre activité. Contactez-nous !