L’abus de minorité : comment le repérer et agir ?
Dans une société à plusieurs associés, la prise de décision en commun est essentielle. Elle est d’ailleurs la plupart des cas obligatoire grâce à la tenue d’assemblées générale. Il est donc important de repérer les situations problématiques et d’agir en conséquence. C’est notamment le cas lorsque les associés abusent de leur pouvoir au sein de l’entreprise et empêchent la prise de décision. On fait le point sur l’abus de minorité !
Qu’est-ce que l’abus de minorité ?
Repérer et prévenir les abus de minorité nécessite tout d’abord de bien comprendre comment fonctionne le droit de vote lors des assemblées générales. On vous explique tout !
Un droit de vote en principe proportionnel aux apports
Les Assemblées Générales (AG) ont lieu au moins une fois par an pour prendre des décisions relatives à la société (stratégie pour l’année à venir, affectation du résultat, etc.). Lors de ces réunions indispensables à une gestion démocratique, chaque associé ou actionnaire dispose du droit de vote pour exprimer son avis.
Le poids de vote d’un associé est le plus souvent proportionnel à son apport au capital social de la société. Au plus il détient des parts sociales, au plus son pouvoir de décision aura du poids ! Le vote d’un associé minoritaire, avec moins de 50 % des parts sociales, aura donc un poids limité.
La règle de proportionnalité de droit de vote ne s’applique pas à toutes les formes juridiques. En SAS par exemple, les actionnaires peuvent déterminer librement les modalités de prise de décision dans les statuts de la société.
Les blocages lors des assemblées extraordinaires
Les associés ou actionnaires doivent tenir une Assemblée Générale Extraordinaire (AGE) pour les décisions modifiant les statuts de la société. Les sujets les plus importants y sont soumis à leur vote, tels que :
un changement de dirigeant
un changement de dénomination sociale (le nom de la société)
une augmentation de capital
la liquidation de la société
Au vu des enjeux, la majorité des voix des associés ou actionnaires est requise pour adopter une décision en AGE. Les modalités varient selon la forme juridique de la société :
En SARL, le Code de commerce stipule que 2/3 des voix sont nécessaires pour adopter une résolution.
La SAS est au contraire plus souple et permet aux associés de définir leurs propres modalités de prise de décision. Ils peuvent ainsi exiger l’unanimité pour prendre une décision en AGE.
Aussi surprenant que cela puisse paraître, les associés minoritaires peuvent ainsi bloquer des décisions.
Imaginons le cas d’une SARL : l’associé A possède 20 % des parts sociales et l’associé B en détient 25 %. Ils peuvent à deux contrer la décision de l’associé majoritaire (avec 55 % des parts sociales), puisqu’il faut réunir au moins 2/3 des voix pour adopter une décision extraordinaire. Cette situation s’appelle une « minorité de blocage ». Si on prend l’exemple d’une SAS qui requiert l’unanimité, l’associé A à lui seul peut contraindre les autres associés à abandonner une opération.
Ces situations relèvent-elles pour autant d’un abus ? Simplitoo vous éclaire.
Quand parle-t-on d’abus de minorité ?
Définition : les deux critères de l'abus de minorité
Pour qu'il y ait abus de minorité, la situation doit répondre à deux conditions :
La motivation de l’associé est exclusivement de servir ses propres intérêts. Il va à l’encontre de ceux de l’ensemble des autres associés ou actionnaires (l'intérêt social de la société).
L’attitude de l’associé s'oppose à une « opération essentielle » pour la société, dont la survie serait mise en péril.
Ces deux conditions sont cumulatives, c’est-à-dire qu’une situation doit répondre à ces deux critères pour être qualifiée d’abusive.
On parle d’abus de minorité positif quand les associés portent volontairement atteinte à la société par l’utilisation détournée de leurs prérogatives (leurs droits). Il peut par exemple s’agir de harcèlement avec questions écrites au dirigeant répétées et non justifiées.
Dans quelle situation peut-il avoir lieu ?
Prenons l’exemple le plus courant d’une opposition à une augmentation de capital.
Si l’augmentation ne met pas en danger la survie de la société, un associé minoritaire peut tout à fait s’y opposer par intérêt personnel. C’est le cas par exemple s’il réalise que le poids de ses parts sociales diminuerait suite à cette opération. En effet, malgré le désavantage pour lui, la situation n'est ni urgente ni grave.
Par contre, il s’agit d’un abus de minorité si l’augmentation de capital social est indispensable à la poursuite des activités de la société. C’est le cas par exemple s’il faut faire entrer un nouvel investisseur pour assurer la survie de l’entreprise. Même si l’associé y perdra au change d’un point de vue personnel, l’intérêt social prédomine dans cette situation exceptionnelle.
Quelles sanctions en cas d’abus de minorité ?
Les associés minoritaires abusifs engagent leur responsabilité délictuelle. Cela la signifie qu’ils doivent réparer les préjudices causés grâce au versement de dommages et intérêts aux autres associés.
Pour en arriver là, les associés peinés peuvent faire appel à un tribunal justice. Ils doivent alors prouver l’abus, le dommage (le préjudice) et le lien de causalité entre les deux. La procédure peut ensuite durer jusqu’à cinq ans et son succès n’est jamais garanti.
Le blocage d’une décision par les associés minoritaires n’aboutit pas à une annulation. La décision reste alors sans réponse finale et un vote devra être reconduit. Le juge peut désigner un mandataire pour faire avancer la prise de décision et représenter les associés minoritaires au moment de voter.
Plus rarement, les associés minoritaires peuvent faire l’objet d’une exclusion de la société. Les parts qu’ils possèdent peuvent alors être revendues aux associés majoritaires.
Dans certaines situations, le juge peut même être amené à dissoudre la société. Ce type de sanction rare est envisageable en cas d’impossibilité de trouver un terrain d’entente entre les différents associés.
Pour éviter l’abus de minorité, il est possible de procéder à une meilleure répartition du capital social. Ceci, dès la création de la société au sein de ses statuts. Ce contrat reprend toutes les règles de fonctionnement de l'entreprise. Bien rédigé, il favorise l’entente au sein de l’entreprise et facilite la prise de décision au moment de voter.
Abus de minorité, d’égalité et de majorité : quelles différences ?
L’abus de majorité
Comme vous pouvez le deviner, l’abus de majorité est le cas inverse d’un abus de minorité. Ce n’est plus un associé minoritaire qui bloque une décision, mais bien un associé majoritaire (avec plus de 50 % des parts sociales de la société). Il s'agit le plus souvent du dirigeant. Cela arrive lorsqu’une décision est prise non pas pour l’intérêt de l’entreprise, mais pour son intérêt personnel.
Contrairement à l’abus de minorité, en cas d’abus de majorité, la résolution prise peut être annulée par le juge. La nullité s’applique donc. S’ajoute aux sanctions une obligation de verser des dommages et intérêts aux autres associés directement impactés par la décision.
Abus d’égalité
L’abus d’égalité est également possible. Ce type de situation concerne les associés ou actionnaires égalitaires, autrement dit ceux possédant 50 % du capital social de l’entreprise. C’est notamment le cas lorsqu’un des deux associés ou actionnaires va à l’encontre d’une décision au détriment de l’autre associé et du développement de la société.
Vous connaissez maintenant tout ce qu’il faut savoir sur l’abus de minorité, ses causes et les façons de l’éviter. Faites appel aux experts Simplitoo pour réaliser toutes vos démarches administratives de création et répondre à toutes vos interrogations. Vous aurez davantage de temps pour vous concentrer sur le point central de votre activité : votre projet ! Il ne vous reste plus qu’à vous lancer dans l’aventure et créer votre société en toute sérénité.